Retour aux actualités
Article suivant
Article précédent

LE REGARD DÉCALÉ

Revue des Ingénieurs

-

28/09/2022

Auteur : Jean-Paul LAVERGNE (N 1966 ICiv)

Arts, inclusions et diversités

Au fil du temps chaque communauté produit des normes de comportement, d’aspect et d’expression, explicites ou implicites, reconnues par ses membres comme structurant leur appartenance. Pour préserver cette identité, toute personne s’écartant de ces normes se trouve marginalisée voire réprimée. Le cas des handicaps est plus variable, entre mise à l’écart et intégration. Dans un environnement de plus en plus complexe les pratiques sociales de certaines communautés s’orientent vers un élargissement des convenances et une recherche d’assimilation des hors-la-norme d’hier que l’on découvre porteurs d’une diversité utile au dynamisme et à l’adaptabilité des sociétés. Peu à peu “l’inclusion” se fait norme. Ainsi le photographe washingtonien Jake McGuire nous fait-il un clin d’œil en incluant un chien extraterrestre à pois verts dans le microcosme huppé de Martha’s Vineyard où règne The Black Dog.

Les rapports entre les arts et les normes sociales restent tumultueux mais celles et ceux que l’on cherche à inclure aujourd’hui peuvent tout autant être placés en position de créateurs que de sujets. Ravel a composé le concerto en ré majeur pour Wittgenstein qui avait perdu son bras droit, l’art brut a fait connaître des créateurs auparavant exclus du monde de l’art, Dergin Tokmak nous éblouit en dansant avec ses béquilles, Capitaine Marleau séduit les téléspectateurs et l’apport de ces différences enrichit le domaine des arts. Les minorités sexuelles, toujours fortement représentées dans la création artistique, craignent maintenant moins la menace de la geôle de Reading ou le regard des normés, au moins dans certains milieux et dans certains pays.

Jake McGuire: Cartoons too funny for the New-Yorker – 50 p. - 2021

Acuité d’un regard décalé

Astrid Nielsen, autiste asperger, travaille à l’écart de l’agitation sociale au sous-sol du service de documenta- tion criminelle. Raphaëlle Coste est commandant de police, fonceuse et extravertie. Le hasard les conduit à collaborer et, au fil des enquêtes, une complémentarité complexe se développe qui confronte deux approches de la réalité, avec une efficacité sidérante dans la résolution des énigmes.

De la difficulté de s’entendre à la construction d’un équilibre sur des bases déconcertantes, de l’étrangeté réciproque à une familiarité troublante, les relations entre autistes et neurotypiques se développent au fil des épisodes avec délicatesse, humour et lucidité.

Sara Mortensen et Lola Dewaere forment un duo remarquable, bien épaulé par le reste de la distribution, très homogène, avec une mention spéciale pour Jean-Benoît Souilh à la présence magnétique.

 

Alexandre de Seguins, Laurent Burtin : Astrid et Raphaëlle –

1 pilote de 90’ et 24 épisodes de 52’ – 2019-2021 – France Télévision RTBF - france.tv/france-2/astrid-et-raphaelle/

Aux confins de l’humanité

Abbie était une femme, elle en est devenue le simu- lacre à la recherche de son identité. Le cheminement de sa conscience la plonge dans une perplexité contagieuse qui pourrait faire vaciller les évidences du lecteur sur le mode de la tirade de Shylock ou de La controverse de Valladolid. Inclure ou ne pas inclure, telle est la question qui se répercute en écho de personnage en personnage.

JP Delaney dynamise l’argument avec un scénario tout aussi riche que rigoureux, testant en permanence les limites de la diversité, jouant à cache-cache avec la transgression, tendu de bout en bout vers un dénouement étourdissant.

Le décor de robotique et de recherche en intelligence artificielle dans la Silicon Valley ne réduit pas ce livre à un simple divertisse- ment de science-fiction. Comme toujours chez JP Delaney l’écriture soulève avec finesse et pertinence quelques questions sur les limites de la condition humaine. Les réponses se trouvent dans la nécessité de vivre et, peut-être, dans la force de l’imagination pour s’affranchir d’un réel écrasant.

 JP Delaney: La femme parfaite – 504 p. - 2020 – Le livre de poche

  • Mazarine – 8,70 €
J'aime
71 vues Visites
Partager sur

Commentaires0

Vous n'avez pas les droits pour lire ou ajouter un commentaire.

Articles suggérés

Revue des Ingénieurs

AFRIQUE :

photo de profil d'un membre

Intermines

18 décembre

Revue des Ingénieurs

AFRIQUE :

photo de profil d'un membre

Intermines

18 décembre

Revue des Ingénieurs

L'urgence climatique

photo de profil d'un membre

Intermines

14 novembre