Auteur : Joël HENRI (N 1967 ICiv)
Les seules mesures de maîtrise des dépenses publiques ne suffiront pas à rétablir l’équilibre du budget et des soldes avec l’extérieur. La croissance est nécessaire et ne peut que résulter d’un redressement industriel, avec en particulier des relocalisations de fabrications qui se sont avérées critiques durant la pandémie.
AVANT LE COVID: LES PROGRAMMES D’INVESTISSEMENTS D’AVENIR (PIA)
Les entreprises peuvent obtenir des financements à moyen ou long terme de leurs investissements auprès de leurs banques. Toutefois ces dernières sont réticentes à financer des projets qui leur paraissent trop risqués. Alors, tout en respectant les règles de la concurrence européenne, l’État peut intervenir par garantie de prêts bancaires, par apport de capital ou de quasi capital ou par des subventions.
Les PIA visent à soutenir des dépenses d’avenir, par exemple la formation ou les universités, des investissements publics et aussi des investissements d’entre- prises privées. Une définition des PIA se trouve sur le site www.gouvernement.fr : “Ils sont pilotés par le Secrétariat général pour l’investissement (SGPI) et mis en place par l’État pour financer des investissements innovants et prometteurs sur le territoire afin de permettre à la France d’augmenter son potentiel de croissance.”
À fin 2020, sur le total de 57 mrd€ de ces plans, 48,3 mrd€ de dépenses étaient engagées et 26,9 mrd€ décaissées.
Pour situer l’importance de ces chiffres, en 2019, selon la comptabilité nationale, la formation brute de capital fixe des sociétés financières, des sociétés non financières et des administrations a été de 425 mrd€.
AVEC LE COVID: DE NOMBREUSES MESURES DE SOUTIEN
Une plaquette du ministère de l’Économie comporte 70 fiches d’une page décrivant chacune une forme d’aide. Il est exclu de les décrire sauf deux qui ont été largement publiées et qui ont résulté en des sommes importantes :
• Les PGE (prêts garantis par l’État) – Les demandes ont été examinées par les banques des demandeurs, ce qui restreint fortement les possibilités de fraudes, puis transmises pour approbation à BPI France mandatée par l’État pour gérer tous les engagements de sa garantie. L’État perçoit une commission de garantie dont le taux augmente au cours de la durée du prêt, ce qui incite à un remboursement anticipé. Accordés sans conditions très restrictives, ils ne devaient toutefois pas remplacer des concours existants. La garantie s’applique à 90 % du prêt. À fin juin 2021, à la fin du dispositif, le montant total des PGE accordés atteignait 140 mrd€ et le nombre de bénéficiaires approchait 700 000. Seuls les impayés sur les remboursements, prévus à 6 % selon certaines études, représenteront une dépense publique.
• Le Fonds de solidarité – Il était destiné aux petites entreprises, indépendants, commerçants et professions libérales qui ont vu leur chiffre d’affaires s’effondrer du fait du Covid. Il a permis l’indemnisation de 90 % des charges fixes (loyers, salaires) non couvertes par les recettes. Selon un rapport du Sénat de juillet 2021, le nombre d’entreprises bénéficiaires du Fonds était de 1 897 000. Les aides, de montants très variables selon le pourcentage de perte de chiffre d’affaires et la taille de l’entreprise, ont été comprises entre 1 500 et 200 000 €. La Cour des comptes a calculé un coût final du dis- positif de 35 mrd€1.
Très importants aussi par leur montant total, les reports de paiement des cotisations sociales atteignaient 21 mrd€ au 14 juin 2021. Les impayés définitifs grèveront les finances publiques. C’est le cas de 5,6 mrd€ qui ont fait l’objet d’exonérations.
PENDANT PUIS APRÈS LE COVID : NOUVEAU PIA PUIS FRANCE RELANCE
Un PIA 4 de 20 mrd€ a été défini en mars 2020, 11 mrd€ en ont été repris dans le plan France relance de 100 mrd € annoncé en septembre 2020. En un premier niveau France relance se répartit en 30 mrd€ pour l’écologie, 35 mrd€ pour la compétitivité et 35 mrd € pour la cohésion. Ce volet inclut l’insertion et la formation professionnelles, la compensation de pertes de recettes des collectivités territoriales, le financement de certains de leurs projets et enfin les investissements dans le cadre du Ségur de la santé.
Le Gouvernement a déclaré fin septembre 2021 qu’à fin août 2,9 mrd€ d’aides à des entreprises industrielles étaient engagées, permettant d’en accompagner 8 885, dont 85 % sont des TPE ou des PME, afin de réaliser 11,7 mrd€ d’investissements productifs et de conforter ou créer 231 000 emplois.
Le volet compétitivité inclut 850 mn € destinés aux relocalisations et au main- tien d’activités qui risquaient d’être délocalisées et qui concernent des secteurs clés : l’électronique (incluant les semi-conducteurs), la santé, l’agroalimentaire, les télécommunications et les intrants essentiels de l’industrie (chimie et matériaux).
Les projets sont pilotés par la Direction des grandes entreprises du ministère de l’Économie et opérés par BPI France (Banque publique d’investissements). 40 % des aides de France Relance pro- viennent du plan de relance européen. France relance fonctionne par appel à projets de (re)localisation. Il appartient aux entreprises candidates de démontrer dans leur dossier de demande que ce critère est rempli.
France Relance a publié à six reprises des listes de projets approuvés qui bénéficieront du soutien de l’État dans le cadre de la (re)localisation. Sans le (re) il s’agit de produits innovants qu’il est important de produire en France. La dernière liste de projets retenus a été publiée le 9 juillet 2021. À cette date les six listes contenaient 351 projets. Ils représentaient 2,4 mrd€ d’investissements industriels soutenus par 637 mn € d’aides de l’État et 41 300 emplois nouveaux ou confortés.
La forme des aides n’est pas publiée. France relance dit seulement qu’elles sont définies au cas par cas.
LE FONDS EUROPÉEN, PUIS NEXTGENERATION EU
Il existait un Fonds européen pour les investissements stratégiques. Selon un communiqué du 28 février 2020, il devait financer 462,7 mrd€ d’investissements dans 28 États membres (27 depuis le Brexit), dont 78,2 mrd pour la France, et soutenir plus de 1,1 million de start-up et de PME.
Ce fonds a été repris dans la Facilité pour la reprise et la résilience, 672,5 mrd €, montant révisable en fonction de l’inflation. Cette Facilité correspond à l’essentiel du programme Next Generation EU, d’un montant initial de 750 mrd€ révisé à 806,9 mrd€ actuellement. La Facilité dont le montant révisé s’élève actuellement à 723 mrd€ consiste en 338 mrd € de prêts et en 385 mrd€ de subventions finançant les plans des États membres. Ils doivent viser la double transition écologique et numérique. Ils sont soumis à l’approbation de la Commission. Ainsi France relance recevra 40 mrd€ sur la partie subventions.
NextGeneration EU sera financé par des emprunts de L’Union européenne sur les marchés de capitaux. Ils seront remboursés jusqu’en 2058 par les États membres, en partie par des impôts perçus dans tous les pays. Les possibilités actuellement envisagées sont : une taxe carbone sur les produits importés dans l’Union, un impôt sur les services informatiques localisés hors de l’Union, la vente de droits d’émission de CO2, une taxe sur les opérations sur les marchés financiers.
1- Au titre de 2021, 6,9 mrd€ de la prévision de 26 mrd€ de la Commission des finances de l’Assemblée nationale ne seraient donc pas utilisés. Un montant de 31,2 mrd€ été communiqué le 24 juin par la Direction générale des finances publiques afin d’élaborer un rapport de suivi conjoint de France Stratégie et de l’Inspection générale des finances. Les chiffres figurant dans des rapports publiés à des dates différentes n’ont pas été relevés aux mêmes dates. Pour avoir un chiffre définitif, il faudra attendre la loi d’approbation des comptes de 2021 par l’Assemblée qui devrait être votée en juillet 2022.
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