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"Bien perdre son job..."

Mediathèque Carrière

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27/04/2021

Quand un cadre perd son job, ce qu’il doit d’abord gérer ce sont ses émotions. 

Et c’est le plus difficile. Beaucoup, à ce moment-là, ne pensent qu’aux conditions matérielles de leur départ, croyant que les difficultés émotionnelles qu’ils rencontrent se résorberont avec un dédommagement confortable.

C’est une erreur.

Ils auront beau négocier les conditions matérielles de leur départ, s’ils négligent de prendre du recul, de s’interroger sur la signification réelle de ce départ et s’ils se ferment aux changements psychologiques qu’il induit, il est fort à parier qu’une situation identique se produira à moyen terme. La pire erreur à commettre quand on perd son job, c’est de ne pas tirer les leçons de ce qui s’est passé et de reproduire la cause qui a produit ce départ. 

Gérer un départ c’est avant tout le gérer sur le plan personnel. Ensuite sur le plan matériel et professionnel.

 

1- BIEN COMMUNIQUER 

 Le fait de perdre son job change un individu, au-delà de ce qu’il imagine le plus souvent.  

A quelles difficultés psychologiques un cadre qui perd son emploi peut-il s’attendre ? D’abord avoir du mal à accepter une situation qu’il considère comme un échec, et de ce fait éprouver du mal à en parler, à dire les choses comme elles sont. Ses repères disparaissant (ses horaires, ses routines, son bureau, son statut), il peut se sentir seul, exclu, incompris, et être tenté de se replier plus encore. Que va-t-il devenir désormais ? Que sera sa vie demain ? La peur de l’inconnu peut rendre son avenir angoissant. Et sa confiance en lui être affectée.

Ces difficultés sont vécues de manières diverses, plus ou moins intenses, selon les personnes. La perte d’un job peut réactiver des sensibilités ou des blessures propres à chacun, à son histoire professionnelle ou personnelle.

Communiquer est alors essentiel : savoir parler de sa situation est le meilleur moyen de la gérer. Cela permet de l’assumer, d’accepter la part de responsabilité qui n’est pas la sienne, d’adopter un état d’esprit constructif et d’instaurer un climat de confiance avec l’extérieur.

Dire qu’on a perdu son travail c’est aussi permettre aux autres de reconnaître la crise que l’on vit, d’obtenir de l’aide et d’être soutenu par son entourage à un moment où on en a grand besoin.

Mais attention : dans cette période de désarroi et de doute, souligne Jean de Mesmay, il est important de ne pas décharger son mal-être sur son conjoint alors que le conjoint souffre aussi. C’est souvent la partie oubliée. Se faire accompagner par quelqu’un de l’extérieur est une façon de préserver l’espace familial.

Si certains cadres taisent leur licenciement ou tardent à le dire, d’autres au contraire en informent immédiatement toutes leurs connaissances. Cela répond au besoin d’exprimer leurs émotions, et souvent ces personnes ne cachent ni leurs rancœurs, ni leurs angoisses. Un besoin bien compréhensible mais qui conduit à une communication brouillonne, inopinée et qui peut leur porter grand tort. 

S’il est important de pouvoir dire qu’on a perdu son job, il est tout aussi important de savoir bien le dire. De savoir communiquer de manière sélective et progressive auprès de son entourage personnel et professionnel. De savoir communiquer de manière positive sur soi-même (sans se dénigrer, se dévaloriser) et sur l’entreprise, à l’extérieur comme à l’intérieur de celle-ci.  

 

2- BIEN NÉGOCIER

La négociation d’une transaction de départ est conséquente mais attention à ne pas se focaliser sur les seuls résultats matériels : la manière dont on va conduire cette négociation aura des incidences sur sa stabilité émotionnelle et sur sa capacité, plus tard, à se repositionner professionnellement. C’est important que le cadre mène lui-même cette négociation, fait remarquer Emmanuel Pérard, qu’un tiers ne s’en saisisse pas. Le cadre qui conduit la sienne gagne beaucoup en estime et en parle avec fierté.

Il n’y a pas une et une seule façon de négocier un départ. Il convient de mettre au point des stratégies et des tactiques de négociation adaptées. 

Car on a beaucoup à gagner d’une bonne négociation de sortie : obtenir immédiatement réparation et éviter l’inconnu du jugement du tribunal des prudhommes, clore sereinement la relation avec l’employeur, bénéficier d’une contrepartie financière pour compenser la baisse de revenus et maintenir son niveau de vie, disposer de temps pour se repositionner sur le marché du travail et s’assurer que l’employeur parlera de lui de manière non dénigrante (y compris au sujet des raisons du départ).

Le cadre licencié et l’employeur ont tous deux intérêt à ce que la séparation se passe bien. Aussi est-il important d’installer un climat constructif dès le premier entretien (courtoisie, respect, sang-froid). Les entretiens s’anticipent, se préparent et il est dans l’intérêt du salarié qu’ils restent toujours confidentiels. 

Le cadre, qui voudrait vite sortir de l’inconnu, trouve généralement interminable la période de négociation. Or la patience est un point-clef de sa réussite. L’expérience montre que plus on est pressant avec ses interlocuteurs, moins ceux-ci sont facilitants.

Il convient de ne pas être obsessionnel sur la négociation : on ne joue pas sa vie, et il faut savoir l’arrêter à temps.

Quand on perd son job, les résultats matériels de la négociation transactionnelle ne sont pas forcément l’enjeu le plus important. On a davantage à gagner en préservant ses chances de repositionnement professionnel et à perdre en compromettant sa réputation. 

 

3- BIEN QUITTER SON EMPLOYEUR

Quand on perd son poste, se concentrer sur la poursuite de sa carrière devient une très bonne façon de garder la tête sur les épaules et de rester constructif. Car on se tourne vers l’avenir.

Contrairement au réflexe panique de nombreux cadres, il ne faut pas foncer tête baissée pour retrouver un poste immédiatement après avoir appris qu’on a perdu le sien. 

Cela pour deux raisons. D’abord car on ne sait pas encore ce qu’on veut faire. Souvent on pense vouloir refaire le même travail dans un même environnement mais c’est par défaut, sans s’être donné le temps d’y avoir vraiment réfléchi. Ensuite car on n’est pas à ce moment-là en capacité de se présenter et de communiquer de manière correcte. Il y a un grand risque à « griller » son réseau quand on le mobilise avec une communication désordonnée, un projet peu clair et une nervosité mal canalisée. 

Alors que faire ? Perdre son emploi est une étape professionnelle comme une autre, et qui, comme toute autre, se gère avec méthode.

La méthode consiste tout d’abord à bien quitter son employeur : bien achever sa mission et communiquer sur son départ de façon concertée avec lui ; ensuite à réfléchir à son avenir professionnel en prenant le temps de s’interroger vraiment et de s’informer ; enfin, une fois seulement qu’on a déterminé ce que l’on souhaite faire, à chercher pro-activement un emploi.

Une nouvelle étape de sa carrière peut alors commencer. Une nouvelle étape que le cadre abordera avec d’autant plus de confiance qu’elle sera l’issue d’une crise bien gérée. Bien perdre son job, nos clients nous le disent souvent, rappelle Valérie Féret-Willaert, donne plus de confiance pour la suite et apporte aussi une forme de dignité. Ils disent aussi qu’ils aborderaient une nouvelle crise potentielle avec moins d’appréhension, plus de recul et de sérénité.

 

Article collectif coordonné par Nicolas Bontron, Associé du cabinet Transition Plus spécialisé en accompagnement de dirigeants en crises de carrière. 

 

 

 

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